La France est reconnue comme le « leader européen de la Fintech », avec 14 licornes, d’après une étude récente de KPMG/France FinTech. En 2024, le secteur a levé 1,3 milliard d’euros, témoignant d’une croissance significative. Cependant, au-delà de ces chiffres encourageants, l’écosystème français doit s’adapter à un cadre réglementaire en évolution constante et faire face à des enjeux géopolitiques complexes. Dans cet article, nous allons examiner sans parti pris les résultats de l’étude KPMG tout en les resituant dans un cadre européen et international.
- La France est un leader européen de la Fintech, avec 14 licornes et 1,3 milliard d’euros levés en 2024, selon une étude de KPMG.
- Malgré cette croissance, les défis réglementaires posés par MiCA et DORA soulèvent des préoccupations quant à leur impact sur l’innovation et la compétitivité internationale.
La France en tête sur la FinTech européenne
Le 6 février dernier, KPMG, en collaboration avec sa branche française, a publié les résultats de l’étude « Pulse of Fintech France 2025 », visant à dresser un état des lieux de la FinTech en France et à la comparer avec celles de nos voisins européens.
L’étude révèle une croissance significative, avec un total de 1145 entreprises opérant dans le secteur de la FinTech en France.
Par ailleurs, le pays affiche 14 licornes Fintech, une proportion importante des licornes françaises. Pour rappel, une licorne est une entreprise ayant atteint une valorisation d’au moins un milliard de dollars. Parmi ces licornes, on trouve Alan, Ledger, PayFit, Qonto, Spendesk, Sumeria, et Swile.
En 2024, les entreprises FinTech en France ont levé 1,3 milliard d’euros, grâce à 101 opérations de financement. Bien que ce montant soit supérieur à celui de 2023, il reste en dessous des 2,9 et 2,2 milliards d’euros levés respectivement en 2021 et 2022.
De plus, 23 % de ces entreprises ont une présence à l’international, notamment en Europe.
Leader en Europe ? Du moins selon KPMG
Cependant, une question demeure. Dans les 67 pages du rapport KPMG qui positionne la France en tête, les données européennes font cruellement défaut.
Il n’y a aucun comparatif avec d’autres pays européens, rendant difficile de valider l’affirmation de leadership mise en avant.
Bien que le rapport s’appuie sur une méthodologie mixte, il n’inclut aucune étude comparative avec d’autres États membres.
Cela soulève des interrogations sur l’assertion dans leur communiqué de presse stipulant que « La France est le 1er écosystème fintech de l’Union européenne ».
En réalité, cette déclaration est fondée sur une citation d’Alain Clot, président de FinTech France, qui évoque :Â
« Le résultat de ces efforts est devant nous : avec plus de 1 000 entreprises couvrant l’ensemble des verticales des services financiers innovants, 14 licornes et 50 000 emplois, la fintech française est en tête de l’UE (deuxième de l’Europe géographique derrière le R.U.) et constitue le premier compartiment de la tech française. »
Peut-être a-t-il accès à des données européennes qui ne figurent pas dans le rapport de KPMG.
Les défis de la réglementation : MiCA et DORA
Si la France dispose d’un écosystème Fintech en plein essor, elle doit néanmoins s’adapter à un cadre réglementaire de plus en plus complexe, amplifié par l’entrée en vigueur de MiCA et DORA.
MiCA : la nouvelle réglementation crypto
MiCA (Marchés des Crypto-Actifs), en vigueur depuis le 30 décembre 2024, a pour objectif d’harmoniser les règles relatives aux crypto-actifs, imposant de nouvelles obligations aux prestataires de services d’actifs numériques (PSAN) en matière de transparence, de protection des investisseurs et d’intégrité du marché.
Cette réglementation représente un défi majeur, en particulier en raison des exigences complexes en matière de transparence et de conformité en matière de cybersécurité.
Malgré son ambition de renforcer la sécurité, l’application de MiCA pourrait freiner l’innovation et la compétitivité des entreprises européennes face à leurs homologues américaines.
DORA : une réglementation qui touche directement les FinTech
DORA (Digital Operational Resilience Act) vise à renforcer la résilience des acteurs financiers, y compris les FinTech, face aux risques de cybersécurité et d’incidents informatiques.
DORA impose aux prestataires de services sur crypto-actifs d’adopter un Système de Management de la Sécurité de l’Information (SMSI) conforme à des normes reconnues, telles que l’ISO 27001.
Une nouvelle fois, des acteurs du marché craignent que ces exigences ne freinent l’innovation européenne et n’inquiètent les investisseurs étrangers.
Numéro un, peut-être, mais qu’en est-il de la compétitivité à l’international ?
Cette étude coïncide avec le Sommet pour l’action sur l’Intelligence Artificielle qui s’est tenu à Paris.
Lors de cet événement, les États-Unis ont refusé de signer la Déclaration du Sommet de Paris sur l’IA.
La délégation américaine a critiqué la régulation européenne sur les technologies, jugée « excessive », et a exprimé des inquiétudes concernant une éventuelle collaboration avec la Chine.
Ces tensions géopolitiques pourraient avoir des répercussions sur la Fintech française, notamment en matière d’accès aux marchés internationaux, en particulier américains.
En somme, la France dispose d’un écosystème Fintech dynamique. Toutefois, la véracité de sa position de leader en Europe reste à confirmer. De plus, l’Europe doit naviguer à travers une réglementation perçue comme trop restrictive à l’étranger, qui risque de freiner l’innovation locale tout en repoussant les investissements étrangers.