Vous êtes à bout de souffle ? Tandis que les États-Unis et l’Asie planifient déjà l’avenir de la finance dans des jets supersoniques, l’Europe reste ancrée au sol, s’affairant à peaufiner ses protocoles. En 2023, l’Union européenne se présentait pourtant comme une pionnière avec le lancement de MiCA (Markets in Crypto‑Assets), un cadre réglementaire novateur destiné à faire du Vieux Continent un pilot de l’innovation crypto. Mais à l’horizon 2025, le constat est sévère : les rivaux ont pris leur envol, tandis que Bruxelles est engluée dans la bureaucratie.
Il suffit de regarder. Aux États-Unis, les législateurs ont choisi une stratégie d’ouverture : des règles flexibles, une collaboration étroite entre secteurs public et privé, et une régulation orientée vers l’utilisation. Le résultat ? Les licornes du Web3 fleurissent, l’engouement des VCs se renforce, et les protocoles innovants se déploient à toute allure. En Asie, l’approche est tout aussi stratégique mais centralisée, avec des États proactifs, des zones économiques spéciales pour les cryptos comme Hong Kong ou Singapour, et une adoption institutionnelle accélérée.
Et en Europe ? On empile les démarches administratives, on peaufine les définitions et on discute des versions futures de sa propre loi, pendant que les acteurs du marché cherchent des horizons plus accueillants. D’où la question cruciale : MiCA sera-t-il le cockpit d’une souveraineté crypto européenne ou le cercueil d’un leadership qui s’accroît ? Analysons la situation.
MiCA : le grand projet européen devenu casse-tête réglementaire
Lorsque l’Union européenne a dévoilé MiCA (Markets in Crypto-Assets) en 2023, le message était limpide : il était temps de ne plus naviguer à l’aveugle dans l’univers du Web3. Pour la première fois, un continent entier mettait en place un cadre juridique unifié pour les acteurs de la crypto, visant la stabilité financière, la protection des consommateurs, et une souveraineté numérique à l’européenne.
Le dispositif semble solide sur le papier :
- licence unique valable dans les 27 États membres,
- exigences de fonds propres (jusqu’à 150 000 € pour certaines activités à risque),
- règles strictes de gouvernance, et surtout,
- responsabilité légale sur les white papers.
Cependant, des ombres se profilent rapidement. Les CASP (Crypto-Asset Service Providers) désignent les prestataires de services autour des actifs numériques : plateformes d’échange, solutions de garde, conseils, trading, ou émission de tokens. Avec MiCA, ils doivent désormais obtenir une autorisation délivrée par l’autorité de leur État membre, valable dans toute l’UE grâce au passeport européen. Une ambition fédératrice, indéniablement, mais qui s’accompagne de charges structurelles lourdes.
Et c’est là que le bât blesse. Ce qui devait être un tremplin s’est transformé en gouffre pour les petites structures. Face aux coûts de conformité, aux délais d’obtention de licences, et à l’opacité de certaines interprétations nationales, le rêve européen vire au cauchemar bureaucratique. Les startups, étranglées avant même de s’élancer, se déplacent vers d’autres juridictions plus flexibles et moins exigeantes.
Un rapport récent a souligné cette réalité : près de 75  % des acteurs cryptos basés dans l’UE risquent de ne pas survivre à l’entrée en vigueur de MiCA.
Une Europe en surplace, survolée par les puissances crypto
À l’opposé, les États-Unis libèrent les énergies. Leur approche – plus flexible et itérative depuis l’élection de Donald Trump – favorise un cadre dynamique où innovation et régulation coexistent sans s’étouffer. En Asie, la situation se démarque encore davantage : régulations ciblées, programmes pilotes agiles et incitations fiscales.
Lors du DigiAssets 2025, Catriona Kellas (Franklin Templeton) a soulevé un point crucial et déclaré : « L’Europe pourrait devenir une simple flyover zone, une région qu’on survole sans s’arrêter. ». De plus, des rumeurs entourant MiCA 2 commencent à circuler dans les couloirs bruxellois.
MiCA 2 : l’Europe doit viser l’agilité réglementaire
Un MiCA 2 est souhaitable, mais pas un MiCA alourdi. Pour éviter la fuite des talents et des investissements, l’Europe doit désormais marier sécurité juridique et flexibilité opérationnelle. Cela implique :
- Clarifier les procédures d’obtention de licences (actuellement longues et variables selon les pays) ;
- Réduire les exigences excessives pour les petites structures ;
- Établir un véritable sandbox européen pour tester des innovations sans les bridés.
L’arrivée de Coinbase et Gemini sur le Vieux Continent, en quête de licences MiCA au Luxembourg et à Malte, envoie un signal clair : le potentiel est présent. Reste à instaurer un cadre favorable pour le déployer sans un parcours semé d’embûches administratives.
L’Europe a prouvé sa capacité à anticiper. Elle doit maintenant démontrer sa capacité à s’ajuster, rapidement et efficacement, surtout qu’elle se prépare à réguler la DeFi pour 2026. À suivre.